30 avril - j'ai testé pour vous...les fonctionnaires
J’ai testé pour vous.
J’ai testé pour vous le Ministère de l’immigration du Qatar. C’est une expérience unique. Amis belges et français, vous ne le saviez pas, mais nul besoin d’obtenir un visa avant de vous rendre au Qatar. En arrivant à l’aéroport, pour une somme modique, de 25 €, vous pourrez obtenir ce fameux sésame. Celui-ci est d’une validité d’un mois mais toute sortie du pays l’annule (je vous assure que j’ai déjà essayé, après un court saut au Koweït, d’invoquer le fait que le mien était toujours valide pour ne pas le repayer, mais rien n’y fit. Bon, ce que je vous raconte n’est que l’introduction du reste de mon récit, donc je ne vais pas longuement m’étendre sur la manière dont les visas sont délivrés à l’aéroport. Je ne vais quand même pas tout vous révéler. Vous n’auriez aucune surprise quand vous viendrez ici au moment de la coupe du monde en 2022. Par contre, j’ai vécu une expérience que vous ne connaitrez à mon avis jamais…la prolongation du visa. Et oui, j’ai dépassé le mois sans quitter ce pays. J’avais donc le choix. Soit, je payais 75 € par jour de retard, soit je renouvelais ce visa pour 25 €. A votre avis, qu’ai-je choisi ? Il m’a fallu ensuite me rendre au Ministère de l’immigration. Je suis chanceux. Il y a trois bureaux à Doha, dont un à Gharaffa…la partie où j’habite. Je m’y suis donc rendu avec mon chauffeur. Et bien, ce ministère est une véritable usine…le nombre de personnes qui y rentrent est impressionnant. Evidemment, il faut des permis pour tout. Des permis pour vivre au Qatar, des permis pour continuer à y vivre tous les ans, des permis pour sortir, des permis pour travailler, des permis pour changer de travail…pour tout, je vous dis. Ne me demandez pas mon avis. Je n’en ai pas et je n’ai pas envie d’en avoir. Bon, revenons à ce Ministère. Je vous passe les péripéties qui entourent mon arrivée dans cette administration. Je vous ferai grâce aussi de l’épisode où par 40° un fonctionnaire de police m’interdit de rentrer avec mon laptop sous prétexte qu’il peut être piégé et m’oblige à attendre 20 minutes le retour de mon chauffeur alors que passent dans l’entretemps 500 indiens porteurs de sacs qui eux ne sont pas fouillés. J’en arrive au corps du récit. C’est très étrange comme Doha est une ville contrastée. Le centre de la ville est incroyablement moderne. En périphérie, on trouve parfois des bâtiments anciens. Et c’est le cas de l’antenne du Ministère où je me suis rendu. Finalement, ce bâtiment est bâtiment est antédiluvien et date au moins de l’époque des anglais (au fait, le Qatar était avant une colonie anglaise. Il n’a obtenu son indépendance qu’au début des années 70). Ce ministère est une espèce de très longue barre de deux cents mètres de long crevée de quatre larges portes. Au dessus de chacune de celles-ci figurent une inscription immense « entrance » et le numéro, au cas où quelqu’un ne pourrait pas deviner que les portes ne sont pas que des sas qui donnent sur des culs de sac. Après avoir un peu cherché, je me suis retrouvé au deuxième étage de l’entrance 3. On ne peut pas dire que les Qataris soient les champions de la signalétique. Il y avait à cet étage, une dizaine de salles encombrées de personnes mais pas un panneau explicatif. Les couloirs étaient remplis d’indiens accroupis, dans une posture que eux seuls peuvent tenir pendant des heures. Allez demander à un indien un renseignement. Il vous regardera en dodelinant de la tête. Vous ne comprendrez jamais si il vous dit oui ou non. Mais je pense qu’il ne le sait pas lui même. Bref, après quelques essais infructueux, je me suis retrouvé dans le bon bureau. J’ai pris un ticket, le 36, et je me suis armé de patience. Quarante guichets attendaient les visiteurs. La salle devait accueillir une bonne dizaine de visiteurs. J’avais donc bon espoir. Je devais passer tout de suite. Et bien détrompez vous. Un panneau d’affichage décomptait les numéros, 79, 80, 56, 64. Spectacle fascinant que ces numéros semblant sortir de façon aléatoire. Devant moi deux qataris assis devisaient. Ne me demandez pourquoi ils étaient là. En tout cas, ils ne se sont jamais rendus à un guichet et sont partis au bout d’un moment. Parfois, un qatari plus âgé entrait et sans prendre de numéro se dirigeait vers un guichet vide. Il faut dire que mis à part deux guichets, tous les autres étaient vides. Les fonctionnaires qui y étaient affectés (des militaires), se trouvaient assis en retrait devant des ordinateurs. Et bien, ils ont des modèles d’un genre nouveau. Ils les manipulent sans les mains. Ils doivent fonctionner à l’aide de mouvements de la mâchoire qui ressemblent à des bâillements, je pense. Evidemment, comme toute nouvelle technologie, elle doit encore faire ses preuves et elle est un peu lente. La preuve, j’ai dû attendre une demi-heure pour qu’enfin mon numéro soit tiré. Et bien, une fois, arrivé au guichet, vous n’allez pas me croire, il ne m’a fallu que deux minutes pour obtenir la fameuse prolongation.
J’en arrive finalement à une réflexion plus globale. Pour être fonctionnaire, faut-il posséder un gène particulier ? C’est peut être une explication au fait que dans la plupart du monde, ils sont les mêmes. J’ai aussi une autre explication plausible. Il se pourrait que l’évolution ait favorisé le développement de certains unicellulaires qui auraient trouvés comme niche pour vivre les administrations. Ces petits gloutons affecteraient le système nerveux de ces fonctionnaires en les rendant justement tout…sauf très nerveux. A vous de me dire ce que vous en pensez.