28 avril - où il est question d'un tigre
Le tigre.
Et bien, ça y est…ils l’ont ! Mais qui, pardi ? Mais le tigre, voyons.
Je sens que ceux qui ne me suivent pas, sont intrigués…et ceux qui me suivent aussi puisqu’en générale, la mémoire humaine est plutôt courte. Evidemment, à force d’être noyé d’informations continuellement, on finit par en perdre ses souvenirs…Faites gaffe. Un jour, vous risquez de vous réveiller et de dire à votre conjoint « Bonjour Madame » (Mesdames, n’allez pas croire que ça ne vous arrivera pas…simplement, à partir d’un certain âge, la seule présence d’un inconnu dans votre lit devrait à ce point vous réjouir que vous aurez trop peur de dire quoi que ce soit, par crainte qu’il ne s’enfuie). J’en reviens à mon histoire de départ : le tigre. Il y a deux bon mois, un tigre a sauté d’une voiture à Doha et s’est enfui. Certains d’entre vous seront sceptiques (comme une fosse). Et bien, vous avez tort. C’est une des lubies des qataris que de s’offrir des animaux sauvages. Jusqu’à présent, ils étaient plutôt friands des faucons. Il y a même un souk qui leur est consacré avec, au milieu, un hôpital qui leur est dédié. Mais à présent, il leurs faut plus exotique et le tigre fait partie de leur petits préférés. Notez bien, j’ai lu récemment qu’il y aurait plus de tigres aux Etats-Unis, chez des particuliers que des tigres sauvages dans la nature. L’espèce humaine m’étonnera toujours. Et bien, notre fameux tigre, souvenez-vous, celui qui me faisait si peur quand je me promenais dans le désert, justement s’y promenait lui aussi tout seul depuis un bon bout de temps. Que mangeait-il ? Nul ne le sait. J’imagine que comme tout bon tigre des villes, ils devaient se nourrir de poubelles. Vous savez, en Alaska, la nouvelle hantise des habitants est de tomber sur un ours des villes. La pêche au saumon, pour ces plantigrades c’est fini. Franchement, se mouiller les papattes et passer des heures à patauger dans une eau glaciale, alors qu’il y a cette nourriture si facilement accessible dans des sacs plastiques qu’il suffit de crever. Donc, ces grosses boules de poil, pas du tout gentilles, se promènent dans les villes et, de temps en temps, ils se bouffent un eskimo (vous aussi, mais ce n’est à mon avis, pas le même genre). Les ours sont des salops. C’est vrai quoi, si ils faisaient leur boulot correctement, il y aurait moins de saumons et mon Sheikh renoncerait peut-être à ne manger que ça. Au fait, le tigre, comment l’ont-ils attrapé ? Et bien, je pense que tout comme moi qui suis fatigué du saumon, cette pauvre bête a dû en avoir marre des restes de cuisine. Un soir, se promenant dans un bout du désert, le fauve à cru humer une pitance qui lui parut un vrai délice. C’était un jeune indien du Kerala qui avait eu l’idée saugrenue de faire comme votre aimable serviteur, une petite promenade crépusculaire. Voilà donc notre félin désireux de changer son quotidien (je vous rassure, il ne m’est pas encore venu à l’idée de manger un indien…même du Kerala). Il se met en chasse. L’indien n’a pas une folle envie de finir en dîner. Franchement, il y a des gens qui n’ont aucune pitié envers les animaux. Il se met donc à courir….et vise un arbre. Il y en a qui devrait jouer au lotto parce que des arbres, au Qatar, il n’y en a quand même presque pas. Et notre petit homme de grimper tel un singe sur un petit bout d’arbre rabougri. Le tigre est très frustré. L’arbre n’est pas assez large pour lui permettre l’ascension. Alors notre fauve fait ses griffes sur le tronc, tentant par cette manœuvre de faire tomber sa proie. L’indien s’accroche de toutes ses forces. Mais le tigre est patient. Il se couche au pied de l’arbre, attendant que notre indien, tel un fruit trop mûr tombe. Cet animal était malin. Avec les premières chaleurs du jour, l’asiate aurait fini par sécher et se serait décroché…d’autant que l’homme ne parvient pas à retenir son sphincter. La nuit s’écoule…Au petit matin, notre ami le tigre décide de donner un peu de la voix question de s’ouvrir l’appétit. Après tout, paralysé par la peur, notre indien pourrait se décrocher à tout moment. Grave erreur du prédateur. Ces cris affamés attirent la maréchaussée qui lui décoche une fléchette tranquillisante. Il était temps, notre indien que les forces de l’ordre n’avait pas remarqué, se détache et tombe à leurs pieds. Je vous rassure, le tigre et l’indien se portent bien. Le tigre à fini en cage au zoo et l’indien derrière les barreaux….d’une cellule dans une clinique psychiatrique. Je vais pouvoir reprendre mes promenades du soir sans crainte de finir au fond de l’estomac d’un animal…jusqu’à ce qu’une nouvelle bête s’enfuie. Ce sera quoi la prochaine fois ? Un lion, un alligator. Je vous le raconterai, de toute façon.